Un après-midi d'été

 

 

 

Un après-midi d'été
     Cd sorti en décembre 2016

1 Il faut tout recommencer

2 Le Grenadier

3 Je te rencontrerai dans un rêve

4 Les Arbres de Corot

5 C'est la faute à Bourdieu

6 Première Nuit

7 La Guitare d'Alexandre

8 Le Pêcheur immobile

9 Pat et Charlie

10 Les Étoiles

11 Tohu-bohu

12 J'ai dormi dans le lit d'une fée

 

Paroles et musique, chant et guitares, Pierre Delorme

 

Enregistré et mixé en novembre et décembre 2016

par Frédéric Finand au studio Oreilles délicates, 38150 Sonnay (www.oreillesdélicates.fr)

Photo : P. Delorme

 
Pour commander le Cd : 
Pierre Delorme 39 rue Paul Verlaine 69100 Villeurbanne   
18 euros ( port compris)


A René

 
Il faut tout recommencer
Nous pensions avoir vu disparaître pour toujours les idées rances d'un vieux monde dépassé. Nous nous étions trompés, elles reviennent au galop.
 
 
Le Grenadier
C'est une pensée pour René Troin, auteur du magnifique "La Crau (Arizona)". On peut y lire un passage où dialoguent un grenadier et des pierres sans mémoire. Un merveilleux morceau de littérature et d'humanité. "La Crau ( Arizona), Éditions Deleatur, 2002".
 
 
Je te rencontrerai dans un rêve
C'est un bon endroit pour se rencontrer, les rêves. Même si les rendez-vous y sont un peu aléatoires.
 
 
Les Arbres de Corot
Une sorte de bavardage libre à partir de la peinture de Jean-Baptiste Camille Corot (1796-1875), notamment les arbres de ses paysages dont la finesse et la légèreté m'ont toujours émerveillé.
 
 
C'est la faute à Bourdieu
"Je suis tombé par terre
C'est la faute à Voltaire
Le nez dans le ruisseau
C'est la faute à Rousseau"
 
Tout le monde connaît ça. C'est la chanson de Gavroche dans Les Misérables de Victor Hugo. Je m'en suis inspiré pour écrire une ""pochade" avec des noms d'aujourd'hui.
 
 
Première Nuit
C'est ma "Première Soirée", comme celle d'Arthur Rimbaud, mais en plus modeste, bien sûr.
 
 
La Guitare d'Alexandre
Alexandre Boyadjian était luthier, à Lyon. Il fabriquait des guitares. A ma connaissance, il était le seul à cette époque. Ébéniste de formation, il avait d'abord travaillé à l’usine. Il m'avait raconté qu'un jour, la mort dans l'âme, il avait scié en deux sa propre guitare pour comprendre comment elle était faite à l'intérieur. Puis il s'était mis au travail !
J'ai choisi pour accompagner cette chanson l'étude n°5 en Si mineur de Fernando Sor (guitariste et compositeur espagnol, 1778-1839) que nous jouions souvent à cette époque.
 
 
Le Pêcheur immobile
Amoureux, on peut être amoureux souvent et même de bien des choses. Le ver de terre l'est bien d'une étoile, alors...
 
 
Les Étoiles
Une jeune femme m'avait demandé un jour "As-tu dégoté de nouvelles étoiles ? ", elle me parlait des jeunes auteurs-compositeurs avec qui je travaillais, mais j'ai pris sa question au pied de la lettre.
 
 
Pat et Charlie
En hommage à deux très grands musiciens américains, Pat Metheny et Charlie Haden, tous deux natifs du Missouri. En 1997, ils ont publié un album en duo (contrebasse et guitare), Beyond the Missouri Sky. Un album d'une rare beauté.
 
 
Tohu-bohu
La nostalgie ça va, ça vient, comme un ange qui passe, en coup de vent au hasard des rues.
 
 
J'ai dormi dans le lit d'une fée
Bien sûr, les fées n'existent pas, mais c'est sans importance.
 

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Premiers retours

 

Plutôt guitares

Peu d’artistes francophones se risquent dans l’exercice casse-gueule du guitare/voix sur tout un album. Parmi les plus réussis, citons Jean-Claude Darnal («Nature»; 2001) et Maxime Le Forestier («Plutôt guitare»; 2002).

À cette courte liste, il faudra ajouter désormais celui que l’auteur - compositeur - interprète français Pierre Delorme vient de publier : «Un après-midi d’été». 

Prof à la retraite, il a pris le temps d’auto-produire ce CD majestueux. Il y chante et y joue de toutes les guitares. Tout seul. Comme un maître. On retrouve ce qu’on aime depuis longtemps chez lui, sa plume, son timbre de voix, ses préoccupations et dilections (la peinture, la littérature, etc). Il consacre une chanson à un luthier*, il dédie son opus à son ami et écrivain René Troin, récemment et trop tôt disparu, hélas…

On ignore s’il s’agit d’un hasard, mais lorsque Delorme écrit Je te rencontrerai dans un rêve, on ne peut s’empêcher de penser à la chanson Je te rencontrerai dans un rêve inversé de Jacques Bertin. Il faudrait lui poser la question, mais on a plus urgent à faire : réécouter ses nouvelles chansons dépouillées, chaudes. Et chercher dans le dictionnaire des synonymes à grandioses, monumentales et sublimes, des mots peut-être trop pompeux pour sa discrétion d’artisan, mais auxquels on peut penser en l’écoutant chanter.

Deux trop courts extraits de cet opus intense sur cette page.

Les amoureux de la guitare peuvent par ailleurs lire trois raffinés billets écrits par Pierre Delorme sur le sujet :   premier   deuxième  troisième…

 

La guitare d’Alexandre, sur la musique du guitariste et compositeur espagnol Fernando Sor (1778-1839), l’étude n° 5 en si mineur.

 

Francis Hébert (La Route aux quatre chansons )

 

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Pierre Delorme, « pêcheur immobile au bord de la rivière des mots »

Très discrètement, comme à son habitude, Pierre Delorme vient de publier un nouvel album (1), le huitième de son parcours d’auteur-compositeur-interprète. Interdit de séjour sur le site officiel de la chanson française de qualité, pour usage répété d’une ironie bon enfant à l’endroit d’un administrateur rancunier, ce collaborateur de « Crapauds et Rossignols » n’y verra donc pas son CD chroniqué. Et comme il serait surprenant que Télérama ou Valeurs actuelles s’y intéresse, faisons-nous plaisir en en disant quelques mots ici même.
 
Si l’avenir court dans une allée ombragée par un bel après-midi d’été, sur la belle photo qui sert de pochette à cet « opus », comme disent les pros, les douze chansons qui le composent regardent plutôt vers hier, baignant dans une douce nostalgie. C’est que Pierre Delorme, enfant de ce baby-boom qu’il chantait déjà dans son précédent CD, arrive comme tous les gens de sa génération, même si bien sûr la vie continue, à l’heure des souvenirs tendres et des bilans, mais parfois même, hélas, à celle des hommages aux amis disparus.
 
Au chapitre du bilan, la première chanson dresse avec clairvoyance celui des soixante-huitards, qui pensaient avoir brisé les chaînes, « jeté aux oubliettes les vieux curés » et « déboulonné les statues », mais qui constatent, lucides, que l’avenir leur a fait faux bond. Aucune aigreur, cependant, dans cette constatation puisque Pierre Delorme invite à « tout recommencer ». Mais si le bilan de la génération baby-boomeuse constate l’échec des idées généreuses et souligne la nécessité de tout recommencer, Pierre n’en oublie pas moins, à l’heure où nombre d’anciens gauchistes paradent au rang des décideurs, de rappeler de quel côté il se situe, à travers une savoureuse « pochade » aux accents hugoliens et « lutte des classes », dans laquelle il convoque Chomsky et Bourdieu, au côté des Pinçon-Charlot.
 
Deux chansons fournissent l’occasion de rendre hommage aux amis restés sur le chemin. En tout premier lieu, bien sûr, René Troin, le compagnon de plusieurs décennies à qui ce CD est dédié. Le grenadier, magnifique composition inspirée par quelques pages émouvantes du très beau livre que René avait consacré à son enfance et à sa région d’origine (2), honore sa mémoire de belle façon. Il sera difficile à ceux qui ont connu et apprécié l’ami et collaborateur de « Crapauds et Rossignols » de n’être pas particulièrement ému à son écoute. Cette chanson fournira peut-être aux autres, souhaitons-le, le désir de se plonger dans cet ouvrage sensible de René. Le second hommage est consacré à Alexandre Boyadjian, à qui le guitariste Pierre Delorme, héritier d’une des guitares de ce luthier lyonnais, offre ici en retour la magnifique Etude n°5 en si mineur de Fernando Sor, habillée d’un texte reconnaissant. Mais il y a aussi les « amis » qu’on ne connaît pas personnellement, ces musiciens qui peuplent nos goûts, qui génèrent et alimentent nos émotions artistiques. Pierre Delorme, dans Pat et Charlie, nous entraîne du côté du Missouri pour un salut fraternel au guitariste Pat Metheny et au contrebassiste Charlie Haden, disparu en 2014. Toujours sur ce thème, une chanson très réussie, d’une parfaite mélancolie, Tohu-bohu, résume à elle seule cette compagnie « éphémère et mouvante » de nos « fantômes familiers ».
 
Mais c’est aussi le souvenir et le désir amoureux que ce CD met en valeur, puisque pas moins de cinq chansons leur sont consacrées. « Pêcheur immobile » amoureux, « au bord de la rivière des mots », Pierre Delorme nous entraîne dans ces songes « où nos amours se promènent à leur guise » (Je te rencontrerai dans un rêve), dévoile ici un « trésor caché » (J’ai dormi dans le lit d’une fée), nous présente ailleurs une charmante « astronome en herbe » (Les étoiles) avec qui monter au septième ciel, ou cette autre coquine pour une Première nuit sensuelle et très poétique.
 
Poursuivant par ailleurs une série de chansons-hommages aux peintres, entamée avec Gauguin et continuée avec Picasso et Renoir, Les arbres de Corot (voir vidéo ci-dessous) nous convient à une méditation à voix haute en compagnie du généreux maître des paysages rêvés.
 
Sur une page de son propre site (3), Pierre Delorme déclare : « (…) j’aime bien qu’on entende encore le silence autour des instruments, que les sons ne soient pas trop abstraits, qu’on sente la présence de quelqu’un en train de jouer. Ça n’est possible qu’avec peu d’instruments à la fois. » Il illustre parfaitement ce propos avec ce CD, dont on pourrait dire qu’il est celui d’un artisan talentueux puisque l’auteur Pierre Delorme s’accompagne ici lui-même avec ses seules guitares, dans un jeu mélodieux et d’une grande élégance.
 

                                                                                      Floréal Melgar

 

          1 - Un bel après-midi d’été, paroles et musique, chant et guitares : Pierre Delorme. A commander directement à l’auteur, XX, rue Paul-Verlaine, 69XXX Villeurbanne.
          
          2 - La Crau (Arizona), de René Troin, Editions Deleatur, 2002.
          
          3 - http://pierredelorme.free.fr/index.htm

 

 

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« Un après-midi d'été »

Tout discrètement, à pas feutrés est arrivé le nouvel album de l'auteur compositeur : c'est le huitième. Pierre Delorme, au fil des ans, a peaufiné son œuvre avec la patience et la maîtrise d'un orfèvre qui se penche sans cesse sur l'ouvrage pour créer quelque chose de beau et d'abouti.

A l'écoute attentive de ce nouvel opus se dégage avant tout de la beauté : beauté des compositions toutes empreintes de ce qu'il faut d'émotion pour vous faire frissonner au fil des douze plages de cette petite merveille.

Le chanteur a vu passer les années, mais pas d'amertume sur le défilé inexorable du temps. Tout est à recommencer, il faut toujours réinventer les révoltes et continuer à « déboulonner les statues » qui ne cessent de se dresser devant nous.

A l'ombre du grenadier se reposent les besogneux et les journaliers, voilà un bel hommage à l'ami René parti sous d'autres cieux il y a quelques mois.

Oui, il faut laisser parler les rêves, se dessiner un visage, laisser se rencontrer les amours ici et ailleurs dans notre imaginaire. « voir la lumière dans les vitraux... croiser Rimbaud... la nuit écouter les hiboux... voir la lune dans les rideaux... contempler les arbres de Corot », célébrer la beauté des paysages dans « la transparence » de notre regard.

Les guitares accompagnent subtilement les chansons. Le frémissement des guitares forme un écrin sans jamais altérer le propos : tout est harmonieux, apaisant. On aimerait se glisser dans l'antre du luthier Alexandre, s'allonger sous le ciel du Missouri pour écouter Pat Metheny et Charlie Haden dialoguer au clair de lune, perdre son regard dans l'immensité d'un ciel d'étoiles.

Parfois, un ange peut vous effleurer l'épaule avant de se dissiper dans le tohu-bohu de la ville mais vous aurez peut-être la chance de « dormir dans les bras d'une fée ».

Daniel Labeyrie

 

 

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« Nous qui pensions avoir mis cul par-dessus tête les vieilles idées / Avoir jeté aux oubliettes les vieux sermons, les vieux curés / L’avenir nous a fait faux bond, nous voici comme des cons / Et il faut tout recommencer. » Dans son huitième album, Un après-midi d’été, Pierre Delorme constate sans élégie la non-pérennité des idéaux soixante-huitards. On pense alors à cette section des Contemplations de Victor Hugo, Les luttes et les rêves ; et les liens qu’on peut faire avec le poète de Guernesey ne s’arrêtent pas là. Dylanien, folkeux du pays de Lyon, Pierre Delorme, penseur de la chanson et de la cité, se lance dans un bilan autobiographique – non sans perspectives, car le constat n’empêche pas la contestation. Curriculum vitae pudique, sentimental et politique au lyrisme sensuel, liant, comme le père Hugo, autrefois à aujourd’hui. L’auteur y surpasse le deuil (la perte de l’ami René Troin, cofondateur avec lui et Floréal Melgar du blog Crapauds et Rossignols), et accueille la sensualité (Je te rencontrerai dans un rêve), voire la nostalgie (Première nuit). Ce dernier titre, librement inspiré de Première soirée, d’Arthur Rimbaud, alterne entre « elle » et « moi » – comme le fait Hugo dans Elle avait pris ce pli – et rappelle également Vieille chanson du jeune temps, d’Hugo toujours. Dans cette idée de filiation hugolienne putative, C‘est la faute à Bourdieu reprend la chansonnette du petit Gavroche en remplaçant Voltaire et Rousseau par Chomsky et Bourdieu. L’orchestration – vraie différence entre Hugo et Delorme – tient uniquement à une guitare, sobre et douce, épurée et élégante comme l’est la poésie de cet album. Tout en finesse.

 

Flavie Girbal (Hexagone)

 

 

 

 

 

 

 

 

Pierre Delorme